Retrouver son souffle
Eleanor avec son mari, Barry, célébrant son anniversaire.
Eleanor Nolt se promenait avec son mari, Barry, près de leur chalet à Jasper, en Alberta. Soudainement, elle a dû s’arrêter pour reprendre son souffle, et ce, sur un terrain plat.
Elle pensait que c’était l’air frais du mois de mars qui l’essoufflait comme ça. Toutefois, cette nuit-là, elle s’est réveillée avec des palpitations cardiaques. « Tout semblait trembler autour de moi, et j’ai fini par comprendre que c’était mon cœur. »
De retour à sa maison, à Edmonton, Eleanor a pris rendez-vous avec sa médecin de famille, qui avait détecté chez elle un léger souffle cardiaque huit ans plus tôt en écoutant son cœur. Ce rendez-vous a servi de tremplin au dépistage d’une légère sténose de la valve aortique. Depuis, Eleanor voit un cardiologue tous les ans ou aux deux ans pour surveiller sa valve.
Après plusieurs examens, y compris un échocardiogramme, Eleanor a reçu finalement un appel troublant de sa médecin : « Êtes-vous bien assise? Vous avez une sténose aortique sévère, et vous aurez sans doute besoin d’une chirurgie. »
Eleanor, aujourd’hui âgée de 73 ans, a raconté son histoire à Une voix aux maladies valvulaires Canada.
Comment votre diagnostic initial de sténose aortique légère a-t-il affecté votre vie?
D’abord, très peu. À mon premier rendez-vous avec le cardiologue en 2013, il m’a dit que ma valve allait devoir être remplacée dans les 10 à 15 prochaines années et que, d’ici là, je ne devais pas m’en faire.
J’allais à mes rendez-vous de suivi une ou deux fois par année. Chaque fois, on me disait que rien n’avait changé, que ça allait. En fait, on me disait souvent que j’allais bien, même très bien.
Avec le recul, je crois que j’ai commencé tôt à éprouver des difficultés à respirer. Par exemple, avant ma retraite, en 2017, quand je prenais l’escalier pour me rendre à mon bureau, au deuxième étage, je devais parfois me mettre à l’écart pour laisser passer les gens derrière moi et reprendre mon souffle.
Je me disais que c’était parce que je n’étais pas en forme, que j’avais besoin de faire plus d’exercice. C’est seulement plus tard que j’ai compris que mon cœur ne fonctionnait pas correctement.
Que s’est-il passé lorsque votre sténose aortique est devenue sévère?
J’ai reçu ce diagnostic au printemps 2021, en pleine pandémie de COVID-19. Le cardiologue a demandé qu’on me fasse passer une angiographie – qui n’a été possible que plusieurs mois plus tard.
Dans l’attente, ma médecin de famille me recommandait fortement de me ménager : « N’en demandez pas trop à votre corps. Si vous vous essoufflez en marchant, prenez une pause pour reprendre votre souffle. » J’ai fini par passer l’angiographie, en juillet. Ne montrant aucune obstruction au cœur, les résultats indiquaient que j’étais prête pour la chirurgie.
À cette date, je devais m’arrêter deux ou trois fois dans les escaliers et fréquemment reprendre mon souffle lors de ma promenade quotidienne. Cependant, encore à cause de la COVID, ma chirurgie a été reportée à maintes reprises.
Comment avez-vous composé avec l’attente de la chirurgie?
J’avais peur de ne pas pouvoir subir la chirurgie, de ne pas survivre à ma maladie. J’ai pleuré plus d’une fois. C’était très stressant pour ma famille.
Pendant la pandémie, je ne pouvais aller nulle part. On m’avait dit de me tenir à l’écart des gens pour éviter que j’attrape la COVID. Le temps passait, et mes essoufflements s’aggravaient. Parfois, durant la nuit, les palpitations de mon cœur me réveillaient.
En attendant la chirurgie, je prenais souvent de grandes respirations : ça m’aidait. Aussi, je continuais à faire de l’exercice pour m’assurer que mon tronc soit assez fort pour soutenir mon rétablissement.
Finalement, vous avez subi un remplacement valvulaire. Comment s’est-il passé?
C’était le 7 octobre 2021, le jour même où j’ai rencontré le chirurgien pour la première fois. Avant mon opération, il m’a parlé pendant environ une heure. J’ai alors appris que j’avais une bicuspidie aortique – je suis née avec une valve aortique à deux feuillets plutôt que trois.
Il m’a recommandé une valve de remplacement tissulaire en raison de mon niveau d’activité et de mon jeune âge – ses mots. J’étais d’accord, d’autant plus qu’une valve mécanique m’aurait obligée à prendre des anticoagulants le reste de ma vie. Avec une valve tissulaire, une petite aspirine par jour allait suffire.
Il m’a expliqué la procédure de l’intervention chirurgicale, notamment l’ouverture de ma cage thoracique. Il a aussi précisé que la convalescence serait d’environ trois mois. « On vous expliquera tout, y compris ce que vous devrez faire et ce que vous devrez éviter. »
Mon chirurgien a été fantastique. Après l’opération, je m’en remettais vite, si bien qu’on m’a donné mon congé quatre jours plus tard, plutôt que les sept jours estimés.
Comment s’est passé votre rétablissement?
J’ai eu beaucoup d’aide à la maison. Ma sœur et mon beau-frère me tenaient compagnie le jour, lorsque mon conjoint travaillait, et mes deux belles-sœurs et des amis m’ont aussi grandement aidée. Mes deux filles venaient souvent me visiter. Je me levais tous les jours pour marcher dans la maison, puis dehors avec mon déambulateur. Chaque jour, j’essayais d’en faire un peu plus – un tour du pâté de maisons, puis deux…
Après environ six semaines, j’ai commencé un programme de réadaptation cardiaque. C’était en virtuel, sur Zoom. Je mettais mon ordinateur sur le divan de sorte qu’on me voit faire les exercices. Le programme, qui comprenait une séance en nutrition, a été bénéfique pour moi. Il m’a été utile d’entendre les réponses aux questions que d’autres personnes posaient.
Ça m’a pris à peu près six mois avant de me rétablir complètement. À ce moment, je pouvais faire tellement plus de choses que ce que j’étais capable de faire avant.
Eleanor et Barry avec leurs deux filles.
Comment vous sentez-vous aujourd’hui?
Super bien! Il y a plus de quatre ans maintenant que j’ai subi ma chirurgie, et je vais beaucoup mieux qu’avant : au cours des 18 mois précédant mon opération, ma santé se détériorait sans que je m’en rende compte.
Aujourd’hui, je fais de l’aquaforme trois fois par semaine et un peu de yoga. Je marche aussi trois kilomètres par jour. De plus, je garde parfois mes petits-enfants, et je participe régulièrement à des activités sociales avec Barry et un groupe d’amis.
On m’a dit que j’allais probablement avoir besoin d’une nouvelle valve dans environ 10 ans et qu’on devrait pouvoir l’installer au moyen d’une technique peu effractive.
Quels conseils donneriez-vous aux gens avec une sténose aortique?
J’aurais voulu savoir à quel point la sténose aortique est une maladie sérieuse. À notre premier rendez-vous, en 2013, mon cardiologue m’a dit de ne pas m’en faire, que la chirurgie était encore bien loin. Ainsi, dans ma tête, ce n’était pas si grave. Pourtant, ce l’était.
D’abord, je dirais à ces personnes de porter attention aux signes d’essoufflement. J’ai compris bien tard l’importance de ce symptôme. Aussi, je leur recommanderais d’appliquer les conseils de leur médecin.
Enfin, je leur dirais d’accepter l’aide des membres de leur famille et de leurs amis. Après ma chirurgie, mon conjoint et moi en avons eu grandement besoin. Il y a des choses que je ne pouvais pas faire. Par exemple, une fois, je n’arrivais pas à ouvrir la porte du réfrigérateur sans que cela me cause une douleur à la poitrine. C’est le genre de choses auxquelles on ne pense pas. Pour les six premières semaines, surtout, on a besoin de beaucoup de soutien.