Le potentiel des stéthoscopes électroniques et de l’IA dans la détection des maladies valvulaires
Le Dr Philippe Pibarot est à la tête de l’étude qui compare les stéthoscopes électroniques aux stéthoscopes traditionnels pour la détection des souffles cardiaques.
Une étude canadienne cherche à déterminer si les stéthoscopes électroniques et l’intelligence artificielle peuvent détecter avec plus d’exactitude le souffle cardiaque que les stéthoscopes traditionnels et, ainsi, favoriser le dépistage précoce des maladies valvulaires. Ce bruit anormal du cœur peut être un signe de ces maladies, qui touchent un million de personnes au Canada et dont l’incidence augmente avec le vieillissement de la population.
Les maladies valvulaires sont courantes, sérieuses et traitables, mais elles passent souvent inaperçues , ou sont détectées ou traitées tardivement. « C’est un problème considérable », affirme le chercheur principal de l’étude, le Dr Philippe Pibarot, directeur de la recherche en cardiologie de l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie du Québec – Université Laval et titulaire de la Chaire de recherche du Canada en cardiopathie valvulaire. Comme elles sont sous-détectées, ces maladies ne sont diagnostiquées qu’à un stade avancé ou ne le sont pas du tout, ce qui cause des morts évitables, compromet la qualité de vie et augmente le coût des soins de santé.
Chercheur principal de l’étude, le Dr Philippe Pibarot est directeur de la recherche en cardiologie de l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie du Québec – Université Laval.
La haute technologie, une avenue pour favoriser la détection précoce et alléger le fardeau sur le système de santé
L’équipe de recherche recueille des données sur plusieurs milliers de participants à des séances d’auscultation au stéthoscope partout au pays. « Nous espérons que les stéthoscopes électroniques favoriseront la détection des maladies valvulaires, allègerons la pression sur les prestataires de soins de santé primaires et améliorerons les résultats pour les patients », souligne le Dr Pibarot, membre du conseil d’administration d’Une voix aux maladies valvulaires Canada.
Ces stéthoscopes enregistrent les sons du cœur, qui sont sauvegardés sur un téléphone intelligent ou une tablette, puis analysés par l’intelligence artificielle (IA). « Ces outils numériques sont très puissants et peuvent détecter même le plus subtil des souffles cardiaques », ajoute-t-il en précisant que l’oreille humaine ne perçoit souvent pas des anomalies que l’IA peut reconnaître. « Ce faisant, la machine est peut-être meilleure [dans la détection] que les médecins. »
La détection électronique, une solution au manque d’accessibilité aux soins de santé
La détection électronique pourrait éliminer les obstacles au dépistage pour plusieurs personnes sans médecin de famille, ainsi que pour les personnes vivant en région, issues des Premières Nations ou appartenant à d’autres populations mal desservies. Si l’hypothèse de l’étude du Dr Pibarot est confirmée – c’est-à-dire que les technologies numériques sont significativement meilleures dans la détection des maladies valvulaires que les outils traditionnels – les stéthoscopes électroniques pourraient se tailler une place dans les milieux communautaires accessibles.
Le chercheur souligne que l’objectif est de trouver une méthode de détection des maladies valvulaires efficace, facile à déployer à grande échelle et peu coûteuse. Contrairement au stéthoscope traditionnel, qui doit être utilisé par des experts, le stéthoscope électronique pourrait finalement devenir un outil autogéré au même titre que les tensiomètres dans les pharmacies. « On n’a pas besoin d’être expert pour utiliser un stéthoscope électronique : l’application mobile vous guide et vous affiche les résultats quelques secondes plus tard, indique le Dr Pibarot. »
L’auscultation au stéthoscope, la première étape du dépistage d’une maladie valvulaire
Quand le cœur fonctionne normalement, le sang y circule d’un ventricule à l’autre, en passant par les valves qui s’ouvrent et se ferment. Lorsqu’une valve fait défaut, la circulation sanguine est affectée et le cœur produit un bruit anormal – appelé « souffle cardiaque » – qui est détectable au stéthoscope par des prestataires de soins qualifiés. Certains souffles ne représentent aucun danger, tandis que d’autres peuvent révéler une maladie valvulaire. Malheureusement, il n’est pas facile d’avoir une auscultation au stéthoscope : plusieurs personnes au pays n’ont pas de médecin de famille et celles qui en ont un(e) ne se font pas régulièrement ausculter le cœur. Une étude récente révèle que seulement 38 % des patients en médecine familiale âgés de plus de 50 ans passent un examen cardiaque au stéthoscope, chaque visite.
Des milliers de personnes possiblement à la merci d’une maladie valvulaire cachée
La principale raison d’améliorer la détection est que plusieurs personnes ont une maladie valvulaire non diagnostiquée. Certaines ne présentent aucun symptôme; et d’autres présentent des symptômes vagues, comme la fatigue ou les étourdissements, et sont souvent attribués à tort au vieillissement « normal ». En février 2025, à une séance d’auscultation à Québec, dans un centre commercial, 150 personnes ont fait la file pour se faire ausculter gratuitement le cœur au stéthoscope. En tout, on a détecté 28 souffles cardiaques, et 7 personnes souffraient d’une maladie valvulaire de stade avancé. Ces personnes n’avaient aucune idée qu’elles étaient atteintes d’une maladie valvulaire grave.
Des séances d’auscultation dans la communauté pour faire avancer la science
Une voix aux maladies valvulaires Canada passe le mot à propos de l’étude dans le but de réaliser sa mission de favoriser la détection précoce et d’améliorer la vie des patients atteints d’une telle maladie. Des cardiologues assureront la collecte de données lors de nos séances phares d’auscultation tenues dans le cadre de nos deux principales campagnes : la Journée de sensibilisation aux maladies valvulaires (22 février) et la Semaine de sensibilisation aux maladies valvulaires (3e semaine de septembre). Soutenir l’intégration des technologies numériques et à distance est l’une des recommandations de notre rapport Maladie valvulaire cardiaque : travailler ensemble pour améliorer le parcours de santé et de vie des patients avec la maladie.